« Deux fois moins de chantiers en 2021 »

Publié le 09/05/2020

Hervé Simon est président de la Fédération des promoteurs immobiliers du Rhône.

 

Observez-vous une reprise des chantiers ? Selon quelle proportion ? 

Oui cette semaine (celle du 4 mai, ndlr), on a dépassé les 50%. Cela concerne aussi bien les immeubles d’habitation que les bâtiments tertiaires. A la fin du mois, on sera à 100% d’activité, y compris pour les chantiers les plus complexes, mais en mode dégradé. Les entreprises ont besoin de reprendre. On ne peut pas rester chez nous indéfiniment.  Dans le secteur du bâtiment, le chômage partiel s’arrête au 1er juin. Après l’urgence sanitaire, on va avoir une urgence économique.

Quels sont les chantiers les plus faciles à reprendre ? 

On a fourni masques, gel, savons… Ce qui est compliqué, c’est la coactivité, quand plusieurs corps d’état interviennent ou quand il y a  de grosses équipes de gros œuvre. On arrive à séquencer selon les niveaux les interventions des différents corps d’état, du carreleur, du menuisier… A contrario, quand seul l’entreprise de peinture travaille sur un chantier, c’est plus facile. Il y a aussi un problème d’approvisionnement. Mi-mars, tout s’est arrêté. Les maitres d’œuvre et les coordonnateurs sécurité et protection de la santé (SPS) sont rentrés chez eux. Il a fallu remettre la machine en route. Mais il y a encore des freins…

« Ces arrêtés municipaux viennent à l’encontre de nos efforts »

Lesquels ?

L’inspection du travail (la Carsat) estime que la maitre d’ouvrage est pratiquement dans une obligation de résultat.  Heureusement, le préfet, à plusieurs reprises, a fait un rappel à l’ordre. On a aussi vu apparaitre des arrêtés municipaux, à Villeurbanne et Caluire, pour réduire notre temps de travail en journée. Parce qu’on fait du bruit en ville, parce qu’on vient nuire le confort des citoyens… Ces arrêtés viennent à l’encontre de nos efforts. On aura au contraire besoin, dans les mois qui viennent, d’élargir la durée de travail à la journée et de pouvoir, par exemple, travailler le samedi.

Ces arrêtés s’arrêtent lundi ?

Normalement à la fin du confinement. J’espère qu’ils ne vont pas être reconduits. Il faut qu’on puisse travailler. Le BTP dans le Grand Lyon, c’est 600 000 emplois…

Les mesures de sécurité ne risquent-elles pas de renchérir l’immobilier ? 

Oui. Par exemple il faut nettoyer les chantiers toutes les deux heures (sanitaires, vestiaires, poignées de porte…). Cela représente rien que pour le nettoyage de 1500 à 4000 euros par mois que l’on va devoir supporter sans doute jusqu’à la fin de l’année. C’est pour cela qu’il faudra des aides compensatrices pour ne pas devoir reporter ce coût sur les clients.

« L’immobilier restera aussi une valeur refuge »

Vous vous attendez à moins de ventes ?

Les gens vont être inquiets sur leur avenir. Certains vont peut-être perdre leur emploi. L’immobilier est un marché basé sur la confiance. Mais les taux d’intérêt sont encore très intéressants, il y aura des clients. L’immobilier restera aussi une valeur refuge pour les investisseurs, par rapport à la bourse. En revanche, il va y avoir un petit coup de frein sur le tertiaire qui est davantage lié à l’activité économique générale. Notre deuxième inquiétude, ce sont les permis…

J’allais y venir…

Depuis le 12 mars, il ne passe plus grand-chose.

Permis de construire : « un trou d’air de six mois »

L’instruction n’a pas repris ?

Doucement, progressivement… La difficulté, c’est que les collectivités n’étaient pas équipées pour faire du télétravail. On se rend compte du retard pris sur le numérique. Certaines villes se sont mises complètement à l’arrêt. Il ne vous a pas échappé non plus que certains maires n’ont pas été élus. On a constaté un certain attentisme avant mars, et on est encore en période pré-électorale. Il va donc y avoir un trou d’air de six mois pour la délivrance des permis et le renouvellement de l’offre commerciale. Cela veut dire deux fois moins de chantiers, deux fois moins de transactions et peut-être deux fois moins d’emplois en 2021 et 2022.

Qu’attendez-vous des responsables politiques, maires et président du Grand Lyon ? 

La durée des chantiers va augmenter. Il va falloir qu’on ait des aides pour passer le cap. Il a été décidé d’exonérer la taxe de voirie sur la Ville de Lyon. Il faudrait aussi exonérer la taxe de publicité sur les chantiers. On souhaite que les taxes d’urbanisme (taxe d’aménagement, PUP) correspondant à la période du confinement soient reportées, et allégées pour les nouvelles opérations.

On demande donc un peu d’allègement de la fiscalité et la reprise des permis. C’est notre oxygène. On fait une suggestion : que d’ici à la fin de l’année, il y ait une forme de bienveillance sur nos demandes de permis, et un traitement express.

 

 

 

 

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