Lyon capitale de la terre… cette semaine

Publié le 12/07/2016

 

La ville accueille jusqu’au 14 juillet Terra 2016, le XIIe congrès mondial des architectures en terre. Rassemblant universitaires, professionnels et autres experts, l’évènement se déroule pour la première fois en France. Il est accompagné de nombre de manifestations pour le grand public.

 

On ne trouve pas de la terre qu’au sol. C’est ce que vont s’attacher à montrer toutes les initiatives qui entourent Terra 2016, le XIIe congrès mondial des architectures en terre qui se tient cette semaine à Lyon. Il y a évidemment des exemples célèbres et lointains: la Muraille de Chine, pour partie construite en terre, ou Shibam au Yemen, la « Manhattan du désert » et ses gratte-ciel. Reste que Lyon et la France ont toute légitimité à accueillir pour la première fois cet évènement du fait d’un « territoire riche et diversifié » en matière d’architectures en terre. La bauge en Normandie, le colombage dans le Nord et le Nord-Est, la brique de terre dans le Sud et évidemment le pisé par ici. « Dans le Dauphiné, 80% du patrimoine ancien est en terre », explique Jean-Marie Le Tiec. Architecte, enseignant à l’école d’architecture de Grenoble, membre du laboratoire de recherche CRAterre et de l’association AsTerre, notre homme connaît le sujet.

Lyon n’est pas en reste: un petit guide détaille quatre parcours sur les traces des constructions en terre à Saint-Just, Vaise, la Croix-Rousse et Tassin. Pour ceux qui douteraient de leur solidité, certains immeubles de trois ou quatre étages sont là depuis le XVIIIe siècle.

Du patrimoine au contemporain

© GA / ENSAG / ENSAL

© GA / ENSAG / ENSAL

L’intérêt de l’édition lyonnaise du congrès c’est, au-delà du patrimoine, de s’ouvrir sur le contemporain. Outre le prototype présenté (voir ci-dessous), va être décerné le 14 juillet le Terra Award, premier prix mondial des architectures contemporaines en terre crue. Les 40 projets finalistes sont visibles jusqu’en septembre chez Archipel, Centre de culture urbaine, place des Terreaux. Cela vous donnera une petite idée de ce que l’on peut réaliser de très beau avec ce matériau.

Aussi investi soit-il, Jean-Marie Le Tiec ne défend pas le « tout terre ». « Il faut utiliser le bon matériau au bon endroit en fonction de son utilité », explique-t-il. Et de rappeler que le Domaine de la Terre, né en 1985 à Villefontaine, a bien résisté au temps. Classé en 2008 parmi les 45 trésors du développement durable en Rhône-Alpes, cet ensemble de 12 ilots et 65 logements a été réalisé par l’Opac de l’Isère, l’Etablissement public d’aménagement de la Ville Nouvelle et le laboratoire CRAterre. « On y a utilisé la technique du pisé (terre humide déversée dans des coffrages), des briques de terre et la terre paille (mélange des deux matériaux). C’est une conception bioclimatique qui montre qu’il est possible de réaliser des logements classiques avec un matériau biosourcé, géosourcé et une ressource locale tant en matériau qu’en main d’oeuvre. Le coût fourni / posé est un peu plus élevé qu’avec le couple béton / placo mais on met l’argent dans l’humain car il n’y a pas encore de filière. C’est surtout une technique qui est moins chère en « énergie grise » (coût tout compris de production, de transport et de main d’oeuvre) et en coût environnemental avec des matériaux locaux et recyclables. De plus, elle est moins chère en entretien et en fonctionnement ».

L’architecte insiste également sur le meilleur confort pour les habitants. « Il y a une meilleure inertie pour gérer la chaleur et la fraicheur avec un matériau minéral qui respire par rapport au béton qui est trop étanche. La terre absorbe et restitue l’humidité ».

Le bon matériau au bon endroit

© GA / ENSAG / ENSAL

© GA / ENSAG / ENSAL

Pour Jean-Marie Le Tiec, « les tours, les ponts, les ouvrages d’art doivent être en béton. Par contre, pour des bâtiments de taille moyenne – jusqu’à R+5 – il n’y a pas besoin de ce matériau. Le béton est très bien pour les fondations ou les soubassements mais ensuite, inutile de rechercher la performance pour la performance. Tout comme construire uniquement en terre n’aurait pas d’intérêt. Il faut utiliser le bon matériau au bon endroit et aujourd’hui la terre est sous-utilisée car dans les formations on ne jure que par le béton. Résultat: malgré toutes les qualités de la terre qui sont aujourd’hui démontrées, la réglementation ne suit pas, il n’y a ni normes ni DTU (document technique unifié) pour ce matériau, ce qui peut poser problème avec les assureurs. Il faut donc avoir une volonté farouche pour construire en terre. Mais à force de diffuser la connaissance ça commence à essaimer ». Terra 2016 devrait y contribuer.

A.B.

Expositions et ateliers: Ma terre première (Musée des Confluences), Architecture en terre d’aujourd’hui (Archipel), Les pionniers de la modernité (Archives municipales), ArchéoTERRA (Musée gallo-romain), Villages de terre (CAUE): www.terralyon2016.com

 

Terra Nostra: un logement comme si vous y étiez

Les étudiants d'archi à l'origine du projet (© GA / ENSAG / ENSAL)

Les étudiants d’archi à l’origine du projet (© GA / ENSAG / ENSAL)

Durant tout l’été, vous allez pouvoir découvrir face à l’Hôtel de Région le prototype Terra Nostra. Il s’agit d’un appartement de 100 m2 avec un étage construit en bois et en terre. Il n’a pas été conçu uniquement pour l’exposition. Début 2017, le prototype va rejoindre la Zac Flaubert à Grenoble  et le parc d’un bailleur social pour s’insérer dans un ensemble de 16 logements sur quatre étages comprenant des espaces communs ainsi que des locaux commerciaux ou associatifs en rez-de-chaussée. « Il s’agit d’une structure en bois avec du remplissage en terre, explique Jean-Marie Le Tiec. Le logement est construit en filière sèche, c’est-à-dire préfabriqué en atelier puis monté sur place. Il y a moins de nuisances, un gain de temps de chantier et de sécurité. On peut ainsi habiter léger, pas cher et respectueux de l’environnement ».

Conçu par des étudiants dans le cadre d’un master partagé entre les Ecoles nationales supérieures d’architecture de Grenoble et de Lyon, Terra Nostra a été construit aux Grands Ateliers de Villefontaine. Il va permette à chacun de se rendre compte de ce que ça fait d’habiter dans un logement en terre.

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