L’église Saint-Bernard consacrée… au business

Publié le 17/06/2016

L’ancien édifice religieux du haut des Pentes de la Croix-Rousse va se muer en centre d’affaires tout à fait exceptionnel d’ici fin 2019, redessinant du même coup la physionomie du quartier, entre le Gros Caillou et la place Colbert.

L'église Saint-Bernard et la place Colbert aujourd'hui (photo DR)...

L’église Saint-Bernard et la place Colbert aujourd’hui…

Quel destin tout de même ! L’église voulue par les canuts, construite entre 1857 et 1866 selon les plans de l’architecte municipal Tony Desjardins (1), jamais achevée, fragilisée par le tunnel du funiculaire et – de ce fait – régulièrement puis définitivement fermée, va ressusciter en… centre d’affaires. Cet « immeuble de bureaux » pour le moins atypique (monacal ?) devrait ouvrir ses portes fin 2019.

... Et demain avec le parvis et ses terrasses (DR).

… Et demain avec le parvis et ses terrasses (photos DR).

Des bureaux dans des box

La nef traversante et, sur les côtés, les boites en bois (DR).

La nef traversante et, sur les côtés, les boites en bois (DR).

Damien Beaufils (Urban Project), à l’origine du projet, « rêvait à un lieu de travail inédit ». Il va être servi. L’église doit devenir le temple des petites industries créatives. Le nouvel usage s’adaptera évidemment au lieu. La nef avec ses 17 mètres de hauteur, alliant volume et lumière, demeurera le lieu traversant avec la réouverture du grand portail, tandis que les bureaux se nicheront sur les bas-côtés et les chapelles aux vitraux signés Lucien Régule (1848-1935). Ils se répartiront sur 32 modules allant de 25 à 40 m2. Ceux-ci prendront la forme de (grandes)… boîtes en bois sur trois niveaux. Ce choix permettra de différencier clairement la structure d’origine des apports contemporains, même si les nouveaux venus auront un petit air de mobilier liturgique.

Les box faciliteront la recherche du confort acoustique et thermique des espaces de travail. Mais Charlotte Vergély, l’architecte du patrimoine, insiste également sur la réversibilité qu’ils donnent au projet. Sachant que le promoteur et futur exploitant de l’église Saint-Bernard new look se nomme Alain Dutoit (Carré d’Or Immobilier), on retrouve là un trio déjà en charge de la reconversion du magasin d’armes et du château de la Motte au parc Sergent Blandan.

Saint-Bernard city work

Le plan du premier niveau du futur "city work" Saint-Bernard (DR).

Le plan du premier niveau du futur « city work » Saint-Bernard (DR).

Le site des Pentes va surtout rejoindre les trois « city work » gérés par Carré d’Or à Lyon (Ainay, Terreaux, Herriot) et leurs 500 postes de travail. Le concept s’adresse à des jeunes entrepreneurs qui se lancent « ou à des personnes pratiquant le télé-travail mais qui se sentent isolées et cherchent à retrouver un environnement studieux et des contacts. Il n’y a pas de bail 3-6-9 mais une location au mois (en moyenne 250 euros le poste de travail tout compris, ndlr). C’est quelque chose qui n’aurait pas marché il y a dix ans mais qui répond aujourd’hui clairement à une demande actuelle », explique Alain Dutoit. Il ne se fait donc pas trop de soucis sur sa capacité à rentabiliser la dizaine de millions qu’il investit à Saint-Bernard étant donné l’environnement exceptionnel et la vue imprenable qui seront proposés.

L’adaptation des nouveaux usages à l’église désacralisée le 8 juin par Mgr Barbarin a une conséquence immédiate: face aux 2 000 m2 de bureaux, les espaces communs (750 m2) représenteront près d’un tiers de l’ensemble là où la norme est plus proche de 5 ou 10%. « L’effet cafétéria » (les rencontres inopinées créatives) cher à Gérard Collomb devrait jouer à plein.

Nouvelle montée des Pentes

Le clocher qui aurait dû terminer l'église (DR)

Le clocher qui aurait dû terminer l’église (DR)

En cédant l’édifice, via un bail emphytéotique de 60 ans, la Ville se soulage d’un poids sans bourse délier. Elle voit également poindre l’opportunité de réhabiliter le quartier.

Faute d’argent, le clocher et le parvis de Saint-Bernard n’ont jamais vu le jour. Ce qui peut pour une part expliquer la fragilité de l’ensemble. Résultat: il y a aujourd’hui un dénivelé – sans issue – de 13 mètres entre l’église et la place Colbert. Le projet prévoit donc de bâtir enfin un parvis. Il prendra la forme d’une succession de trois terrasses en pierre couvertes de jardins suspendus. Soit un total 380 m2 d’espaces publics extérieurs. Cafés et restaurants se nichant dans le parvis. Surtout, la création d’un nouveau passage pour aller vers la montée Saint-Sébastien va permettre de tracer une troisième montée au coeur des Pentes, allant du Gros caillou à la cour des Voraces via la place Colbert qui devrait être réhabilitée lors du prochain mandat.

A.B.

1) A l’origine, entre autres, du Palais de la Bourse, du lycée Saint-Just ou des églises Saint-Polycarpe, Saint-Pierre de Vaise et Saint-André.

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Commentaires sur L’église Saint-Bernard consacrée… au business

  • ANTOINE dit :

    Il y a plus de 30 ans qu’à Amsterdam un ancien temple a été transformé en salle de concert : Le Paradiso (pour les connaisseurs)